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COURS DE COMPOSITION FRANÇAISE.

EXERCICES PRÉPARATOIRES.

PERMUTATION+ DE NOMBRE.

L'IMPERTINENT.

Il

J'entends Théodecte de l'antichambre; il grossit sa voix à mesure qu'il s'approche. Le voilà entré: il rit, il crie, il éclate; on bouche ses oreilles : c'est un tonnerre. n'est pas moins redoutable par les choses qu'il dit que par le ton dont il parle; il ne s'apaise, il ne revient de ce grand fracas que pour bredouiller des vanités et des sottises. Il a si peu d'égard au temps, aux personnes, aux bienséances, que chacun a son fait sans qu'il ait eu intention de le lui donner; il n'est pas encore assis, qu'il a, à son insu, désobligé toute l'assemblée. A-t-on servi, il se met le premier à table, et dans la première place; les femmes sont à sa droite et à sa gauche: il mange, il boit, il conte, il plaisante, il interrompt tout à la fois, il n'a nul discerne

J'ai indiqué de nombreux exercices de permutation dans la nouvelle édition (1867) des Études françaises.

ment des personnes, ni du maître, ni des conviés; il abuse de la folle déférence qu'on a pour lui. Est-ce lui, est-ce Euthydème qui donne le repas: il rappelle à lui toute l'autorité de la table; et il y a un moindre inconvénient à la lui laisser entière qu'à la lui disputer. Si l'on joue, il gagne au jeu ; il veut railler celui qui perd, et il l'offense. Les rieurs sont pour lui: il n'y a sorte de fatuités qu'on ne lui passe. Je cède enfin et je disparais, incapable de souffrir plus longtemps Théodecte et ceux qui le souffrent. -LA BRUYÈRE, (1644-1696.)

Mettez ce portrait au pluriel, en ajoutant le nom d'une autre personne à celui de Théodecte, et en prenant pour titre : LES IM

PERTINENTS.

PERMUTATION DE GENRE.

LE FANTASQUE. (Caractère.)

Il se coucha hier les délices du genre humain : ce matin on est honteux pour lui; il faut le cacher. En se levant, le pli d'un chausson lui a déplu: toute la journée sera orageuse, et tout le monde en souffrira. Il fait peur, il fait pitié; il pleure comme un enfant, il rugit comme un lion. Une vapeur maligne et farouche trouble et noircit son imagination, comme l'encre de son écritoire barbouille ses doigts. N'allez pas lui parler des choses qu'il aimait le mieux il n'y a qu'un moment: par la raison qu'il les a aimées, il ne les saurait plus souffrir. Les parties de divertissement, qu'il a tant désirées, lui deviennent ennuyeuses; il faut les rompre. Il cherche à contredire, à se plaindre, à piquer les autres; il s'irrite de voir qu'ils ne veulent point

se fâcher. Souvent il porte ses coups en l'air, comme un taureau furieux qui de ses cornes aiguisées va se battre contre les vents.

On

Quand il manque de prétexte pour attaquer les autres, il se tourne contre lui-même. Il se blâme, il ne se trouve bon à rien, il se décourage, il trouve fort mauvais qu'on veuille le consoler. Il veut être seul, et il ne peut supporter la solitude. Il revient à la compagnie, et s'aigrit contre elle. On se tait: ce silence affecté le choque. parle tout bas: il s'imagine que c'est contre lui. On parle tout haut il trouve qu'on parle trop, et qu'on est trop gai pendant qu'il est triste. On est triste: cette tristesse lui paraît un reproche de ses fautes. On rit: il soupçonne qu'on se moque de lui. Que faire ? être aussi ferme et aussi patient qu'il est insupportable, attendre en paix qu'il revienne demain aussi sage qu'il était hier. Cette humeur étrange s'en va comme elle vient: quand elle le prend, on dirait que c'est un ressort de machine qui se démonte tout à coup. Il est comme on dépeint les possédés: sa raison est comme à l'envers; c'est la déraison elle-même en personne. Poussez-le; vous lui ferez dire en plein jour qu'il est nuit, car il n'y a plus ni jour ni nuit pour une tête démontée par son caprice. Quelquefois il ne peut s'empêcher d'être étonné de ses excès et de ses fougues. Malgré son chagrin, il sourit des paroles extravagantes qui lui ont échappé.-FENELON (16511715.)

Mettez ce caractère au féminin, en prenant pour titre : LA

FEMME FANTASQUE.

PERMUTATION DE PERSONNE.

LE PRIX DU TEMPS, (d'après Buffon.)

GEORGE-LOUIS LECLERC, comte DE BUFFON (1707-1788), un des plus célèbres naturalistes de l'Europe et l'un des quatre† grands prosateurs français du XVIIIe siècle, passa quarante ans de sa vie à écrire son Histoire naturelle, qui est un des plus beaux monuments de la langue française.

Dans ma jeunesse j'aimais beaucoup à dormir, et il était rare que le sommeil ne me dérobât pas la moitié de mon temps. Mon pauvre Joseph faisait tout ce qu'il pouvait pour vaincre ma paresse, et il se passait peu de jours qu'il n'essayât de me guérir de ma maladie; mais il arrivait rarement qu'il réussît. Je lui promis un soir un écu pour qu'il me forçât de me lever à six heures. Il était impossible qu'il ne vînt pas le lendemain matin me tourmenter à l'heure que je lui avais fixée, mais je lui répondis brusquement. Le jour suivant, il vint encore: cette fois-là je lui fis de grandes menaces, et peu s'en fallut qu'il ne me crût sérieusement fâché.

"Joseph," lui dis-je dans l'après-midi, "j'ai perdu mon temps, et tu n'as rien gagné; je veux que tu comprennes mieux tes intérêts, et que tu ne penses qu'à la promesse que je t'ai faite, et que désormais tu ne fasses aucun cas de mes menaces."

Le lendemain il en vint à son honneur. D'abord je le priai, je le suppliai, puis je me fâchai; mais j'avais ordonné qu'il ne fît aucune attention à tout ce que je lui dirais, et cette fois il obéit ; je fus forcé de me lever, quoi

+ Les trois autres sont VOLTAIRE, MONTESQUIEU, et JEAN JACQUES ROUSSEAU.

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