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DU TIMBRE DES EFFETS DE COMMERCE,

Qui n'a, bien des fois, remarqué la rédaction imparfaite, le manque d'ordre, et l'obscurité de nos statuts? Qui n'a eu souvent à se plaindre des lacunes regrettables qu'on y rencontre?

On se console assez facilement de ces défauts, lorsqu'il s'agit de lois dont la mise en pratique exige l'intervention des avocats. On se dit, qu'après tout, il faut bien qu'ils gagnent leur argent, et que les clients seraient volés, si l'interprétation des lois était facile.

Malheureusement, l'obscurité n'est pas l'apanage exclusif des lois qui sont du ressort spécial des avocats. Les mêmes vices de rédaction existent, et peut-être à un dégré plus élevé que partout ailleurs, dans les lois qui doivent être mises en pratique par les gens d'affaires, les marchands, les hommes du monde.

Pour ne pas parler du Code Municipal, ce Pérou des avocats, est-il, dans tous nos statuts, une loi plus importante, d'une application plus générale et plus journalière, dont l'interprétation erronée puisse entraîner des conséquences plus graves, que l'acte de faillite? Et, cependant, en est-il une plus mal rédigée, plus obscure, donnant lieu à plus de difficultés et de contestations? Bien qu'elle ait été remise sur le métier plusieurs fois, on y trouve, à chaque instant, des vices et des lacunes; tous les jours elle reçoit des tribunaux des interprétations contradictoires.

Une autre loi que tout le monde est exposé à mettre en prati que, dont la violation peut être suivie des plus désastreux résultats, c'est celle qui fait le sujet du présent article (31 Vict. ch. 9, 33 Vict. ch. 13). Et, ce qu'elle a de particulier, c'est qu'habituellement, on n'a pas le temps de consulter, à son égard, un homme de loi; il faut que chacun soit lui-même son propre jurisconsulte. Il faut que chacun prenne une décision prompte, et une décision d'où peut résulter, si elle est erronée, une perte pécuniare considérable. Cette loi devrait donc être aussi courte, aussi claire, et aussi simple que possible. Au contraire, elle est une des plus obscures, une de celles dont la rédaction est la plus entortillée. Il faut avoir une longue habitude du langage, moitié français, moitié anglais, de nos statuts, pour la pouvoir comprendre.

Aussi, de la meilleure foi du monde, ceux qui ont à la mettre

en pratique l'enfreignent tous les jours. J'oserais dire que, si tout le monde voulait se prévaloir de ses dispositions, il n'y a peut-être pas un effet de commerce qui ne fût invalidé par les tribunaux.

J'ai donc pensé qu'un examen sommaire de cette loi ne serait ni sans à propos, ni sans utilité. Voici dans quel ordre je me propose de traiter les différentes questions qu'elle soulève : 10 Quels sont les effets de commerce qui ont, et quels sont ceux qui n'ont pas besoin d'être timbrés; 20 Quand le timbre doit-il être apposé, de quel timbre faut-il se servir, et comment doit-il être mis; 30 Quand et comment peut-on remédier au défaut d'apposition régulière de timbres, et qui a ce droit; 40 Quelles sont les conséquences du défaut d'apposition de timbres, ou de leur apposition irrégulière.

I.

Quels effets de commerce ont besoin de timbres?

On peut dire que ce sont, en général, tous les effets de commerce, c'est-à-dire, tous les écrits négociables, faits ou négociés en Canada, promettant ou ordonnant le paiement d'une somme d'argent.

Cela comprend les billets, les lettre de change, les mandats, les lettres de crédit, les obligations (débentures) des corporations, les coupons d'intérêts de ces obligations, les reçus ou certificats de dépôts d'argent donnés, soit par des banques, soit par d'autres corporations, soit par des particuliers, pour faire obtenir de l'argent d'un tiers (sect. 1 et 2).

Mais il faut que ces documents soient négociables; aucun timbre n'est nécessaire sur les effets payables à une personne individuellement déterminée. Ceux-ci ne sont pas des instruments de commerce, et il suffit de lire la loi pour se convaincre que c'est de ces instruments seuls qu'elle a voulu parler, et pour voir qu'elle n'a entendu taxer que les documents négociables. Elle le dit formellement, à l'égard des billets promissoires, lettres de change et certificats ou reçus de dépôts. Quant aux autres documents que nous avons vus, elle ne le décide pas formellement, mais elle l'indique d'une manière évidente. Sauf dans les clauses qui énumèrent les docu. ments sujets au timbre, elle ne parle que de billets, traites, lettres de change. Puisqu'elle n'a pas répété le nom des autres documents, c'est qu'elle les considérait comme de même nature. plus, elle parle, à plusieurs reprises, des droits et des obligations d'un porteur de bonne foi. Un porteur de cette espèce ne peut

De

jamais être une des personnes qui ont pris part à la confection du document; car aucune d'elles ne pourait ignorer une violation de la loi commise à ce moment. C'est nécessairement quelqu'un à qui le document a été transféré. Cela suppose donc qu'il s'agit d'un effet négociable.

Il faut, en second lieu, que ces documents aient pour objet le paiement d'une somme d'argent. Ici encore, la loi est formelle, à l'égard des billets, lettres de change, traites, certificats de dépôt, et lettres de crédit. Elle est moins claire quant aux obligations de corporations. Mais tout doute disparaît, lorsqu'on fait atten tion que la qualité de l'impôt est en proportion du montant en argent de l'effet dont il s'agit. Comment pourrait-on établir cette valeur, s'il s'agissait de quelque chose qui ne serait pas une somme d'argent?

Mais, pourvu qu'ils aient ces deux caractères, peu importe que ces documents soient à ordre ou au porteur; peu importe qu'ils soient payables à demande, à une date déterminée, à tant de leur date, à tant de jours de vue. Et, puisqu'il faut des timbres sur tous les instruments de cette espèce, il suit que si un billet ou une traite sont altérés de manière à en faire un nouveau document, il faut les timbrer de nouveau. On considère comme suffisante pour constituer un nouveau document, l'altération qui porte sur la date, sur la somme. Il n'y a pas besoin de timbrer de nouveau un écrit qui n'a reçu qu'une altération sans importance, surtout lorsqu'elle se fait en exécution d'une convention primitivement arrêtée entre les parties.

Quels effets n'ont pas besoin de timbres?

Se trouvent exempts de timbres, les billets faits, soit sous seingprivé, soit devant notaire, qui promettent de payer autre chose qu'une somme d'argent déterminée, ou qui, promettant une somme d'argent, ne sont payables qu'à un individu, parcequ'ils manquent aux deux conditions que nous avons vues. A cette dernière classe appartiennent les obligations notariées.

En sont aussi exemptés, les billets, lettres de change, traites ou mandats, qui promettent ou ordonnent le paiement d'une somme d'argent sous condition, parceque ce ne sont pas des billets ou lettres de change, ou traites dans le sens ordinaire, et que la loi n'ayant pas défini les expressions qu'elle emploic, celles-ci doivent être prises dans le sens ordinaire.

Il résulte de ce qui précède une conséquence qui pouvait être

d'une grande portée, lorsque nous étions inondés par la monnaie d'argent des Etats-Unis, et qui n'est pas sans importance pratique encore aujourd'hui. On faisait alors un grand nombre de billets et de traites payables en monnaie, c'est-à-dire, en monnaie d'argent. De pareils documents sont négociables, sans doute, au moins depuis la promulgation du code civil, (art. 1573); mais ce ne sont pas des billets ou des lettres de change, au sens propre et légal du mot. Ils n'entrainent pour leurs porteurs, ni les droits stricts et spéciaux résultant des billets et des lettres de change. Ils ont les mêmes effets légaux que des billets ou traites pour la livraison de grains ou autres marchandises. Notamment, ils ne donnent aucun recours au porteur contre les endosseurs. Et, pour ne nous occuper que de la question du timbre, ils ne sont pas soumis à l'obligation du timbre proportionnel.

Il est, cependant, à ma connaissance, qu'en pratique on avait l'habitude de leur apposer des timbres comme à de véritables effets de commerce. Il est vrai aussi, que les marchands les considéraient comme tels, et s'imaginaient, à tort, qu'ils donnaient à leurs porteurs tous les droits du porteur légal d'une lettre de change, ou d'un billet promissoire.

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On ne voit guère de ces billets aujourd'hui, mais il n'est pas tile de constater que, s'il s'en faisait encore, ils seraient exempts de la loi sur le timbre des effets de commerce.

Sont encore exempts de timbres, les billets, lettres de change ou traites, émanant d'un officier soit du gouvernement impérial, soit du gouvernement de la Puissance, en sa qualité officielle; les mandats sur la poste ou sur une caisse d'épargnes de bureau de poste; les débentures, ou coupons d'une corporation municipale, les billets des banques incorporées par le parlement du Canada, et les chèques sur ces mêmes banques ou sur des banques d'épargnes, si ces chèques sont payables à demande.

Quelques unes de ces exemptions demandent un mot d'explication. J'ai donné comme exemptés les billets donnés par cer tains officiers publics. La loi ne parle que des traites; mais il est évident qu'on doit l'appliquer aussi aux billets. La même raison se rencontre dans les deux cas; c'est que taxer ces documents, ce serait taxer l'Etat lui-même, ce qui est contraire à tous les principes de taxation. D'ailleurs, la question est sans intérêt pratique, car il est bien certain que, ni ces officiers, ni le gouvernement du Canada, ne s'aviseront jamais de se prévaloir, pour ce cas, des dispositions de la loi.

J'ai dit: officier soit du gouvernement impérial, soit du gouvernement du Canada. Au lieu de ces derniers mots, le statut se sert de l'expression: gouvernement provincial. Mais il est clair qu'ici provincial a été mis par inadvertance. On a oublié de changer le mot, en copiant la loi qui avait été faite pour l'ancienne province du Canada.

Quant aux chèques, on est généralement sous l'impression à Québec du moins, que pour qu'ils n'aient pas besoin de timbres, il faut qu'ils soient au porteur. Beaucoup de marchands qui ont des blancs de chèques portant à ordre ou au parteur, croient devoir rayer les mots à ordre. Je ne sais d'où peut venir cette idée; mais elle n'est certainement pas fondée sur la loi. Tout ce que le statut exige, c'est que le chèque soit payable à demande. Peu importe, du reste, qu'il soit payable à ordre ou au porteur.

Les seules débentures exemptées de timbres sont celles émises par une corporation municipale. L'exemption faite pour cette cspèce de corporation, implique nécessairement que les débentures émises par d'autres corporations doivent être timbrées. On doit donc apposer des timbres aux débentures des compagnies des mines, de chemins de fer, ou de toutes autres compagnies incorporées qui sont autorisées à en émettre.

Cette dernière conséquence de la loi a une portée si grande, qu'elle démontre la nécessité de l'amender pour assimiler toutes les débentures de corporations. L'impôt du timbre serait ume charge énorme pour nos nombreuses compagnies de chemin de fer de formation récente.

Bien que la loi ne le dise pas expressément, l'exemption ne doit pas s'appliquer aux débentures de corporations municipales étrangères au Canada. Car la raison de l'exemption ne leur est aucunement applicable, sans compter que celles de ces corporations qui ne sont pas établies dans une possession britannique, ne sont pas des corporations d'après nos lois.

Enfin, sont exempts de timbres, les effets de commerce que nous avons vu y être ordinairement assujettis, lorsqu'ils sont pour une somme moindre de $25 (sect. 1). Ainsi, un billet de $24,99 n'a pas besoin d'avoir de timbre; mais un billet de $25, ou davanvantage, doit en être revêtu.

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